Bouleversement (2e partie) (Art. 5)
Laissez-moi vous dire d’entrée de jeu que j’écris
ces lignes en ce dernier jour de janvier 2024, fête de saint Jean Bosco, patron
de la jeunesse. Il fut une grande inspiration, un fidèle ami spirituel depuis
ma tendre enfance, dès que mes parents m’ont acheté la bande dessinée sur sa
vie et celle de son jeune disciple saint Dominique Savio (de là ma surprise
quand je participai à ma première soirée charismatique dans l’école du même nom
que ce saint enfant. Comme un clin d’œil du Ciel.) On s’en reparle dans un
autre article.
Nous voilà
donc réunis dans l’église Saint-Pierre-Apôtre, au centre d’un espace créé
derrière les bancs (comme dans beaucoup de lieux de culte catholique, suite à
la baisse radicale de fréquentation dominicale, des rangées de bancs devenus
inutiles ont été enlevées pour permettre différents usages de ce genre,
rencontres, cafés partagés, etc. Très pertinent.). Chaque lundi soir, j’y
retrouvais une ambiance feutrée, accueillante, chaleureuse, où l’on me connaissait
par mon nom et où l’on m’attendait. Au lieu d’être assis comme dans un autobus,
les chaises étaient disposées en cercle, ce qui facilite la communion, le regard
vers l’autre, le contact. Nous étions une vingtaine, parfois un peu plus. Ce
fut une expérience nouvelle, dans un contexte de foi, que de me retrouver ainsi
entouré de gens qui me tendaient la main et voulaient me connaître et cheminer
avec moi.
Choc
culturel aussi, je l’avoue. Un jour, j’entends la jeune femme assise à mes
côtés rendre grâce à Dieu à voix haute de l’avoir aidée à sortir de la
prostitution. Un homme proclamait les louanges du Seigneur pour l’avoir sorti
de la drogue et de la rue. Un jour, une dame me révèle qu’elle en est à son
cinquième conjoint (certains l’avaient battue, manipulée, volée…), mais qu’enfin
elle a découvert le plus grand Amour de sa vie : Christ. Et ce jeune homme
qui sortait tout juste de prison et semblaient si heureux d’être ‘reçu’
inconditionnellement. Quelques exemples seulement de la misère humaine, dont je
connaissais l’existence, mais que je n’avais jamais côtoyée de si près,
concrètement, régulièrement, et, je dirais, intimement. Cela me travaillait
fort et m’émeuvait. J’y voyais tout à coup la force de l’Évangile à l’œuvre (à
cette époque, je n’avais pas encore réalisé que nous vivions cette puissance de
la foi incarnée dans le quotidien ordinaire, au sein de notre humble maison de
Montréal-Nord, ouverte à tous les souffrants de ce monde…) et la confirmation que
celui-ci permet des changements radicaux dans l’existence.
Animée par
un Père Oblat et une laïque consacrée, j’ai vécu dans cette petite cellule d’Église,
de grands moments de fraternité et de rencontre avec le Seigneur, l’un
nourrissant l’autre. Alors que ma paroisse manquait malheureusement de ‘Souffle’,
j’ai découvert dans cette vieille église du Centre-Sud de la Métropole, de la
vie, de la spontanéité dans la prière, de la vérité. J’ai saisi, grâce aux
enseignements entendus, que la Bible n’était pas qu’un livre d’histoires ne
concernant que les gens du passé, mais qu’elle me parlait dans l’aujourd’hui de
mon vécu de jeune de 19 ans, en recherche de sens et de but dans la vie. J’entendais
la Parole de Dieu et me sentait rejoint, touché en profondeur. Les Eucharisties
en petit groupe, que nous faisions à l’occasion d’une fête spéciale, me fascinaient.
J’en mangeais littéralement et il me
tardait toujours -malgré la fatigue des études, du travail en paroisse, des
tâches familiales, du transport en commun- d’arriver au lundi soir.
En d’autres
termes, j’étais en train de tomber en Amour.