La genèse (Art. 2)
(Article DEUX)
Mon
aventure en pastorale-jeunesse s’est préparée de loin. En fait, je devrais
dire : a été préparée de loin par le Seigneur.
Enfant, je
n’ai jamais fait partie de groupe de sport ou de groupe comme les scouts. Pas
de participation à des camps de jour ou des camps d’été. Rien, vraiment, ne
m’attirait à ce niveau. J’avais beaucoup d’amis près de chez-moi et on
s’amusait informellement, ça me suffisait amplement. J’avais d’ailleurs un côté
solitaire qui me faisait apprécier mes temps de lecture personnelle, d’écoute
de musique, de bricolage, etc. À neuf ans, j’ai commencé à apprendre un
instrument de musique, j’ai donc passé plusieurs heures par semaine à me
pratiquer seul, et ça m’allait très bien.
À l’adolescence,
les choses ont commencé à évoluer progressivement : à 15 ans (en 1972), je
fus recruté par ma paroisse pour jouer de l’orgue et faire partie de l’équipe
de liturgie. Vous vous doutez bien que j’étais le seul adolescent impliqué
aussi largement dans la communauté chrétienne. Il y avait eu, un temps, une
messe dite ‘de jeunes’, messe rythmée dans une ambiance colorée (avec les
odeurs âcres de cigarettes à cause du bingo hebdomadaire qui y avait lieu le
vendredi…) au sous-sol de l’église, mais ça s’était terminé avec le départ du
vicaire alors que j’étais encore enfant. À cette époque, nous vivions à la fois
l’effervescence emballante de Vatican II et le malaise d’une transition
difficile pour beaucoup. On se cherchait. La désertion était commencée… Les
croyants par tiède habitude ou pression sociale ont profité de l’occasion pour
quitter le bateau. Quant à moi, n’ayant que très peu vécu l’avant-Concile (j’ai
fait ma première communion à 6 ans, dans la dernière année de l’ancien régime),
je n’avais aucune réticence à entrer de plain-pied dans le renouveau
liturgique, théologique et biblique. Je
me sentais à la fois privilégié de travailler avec des adultes qui me faisaient
pleinement confiance, et peiné de voir si peu de jeunes de mon âge engagés activement
dans la religion.
À cette
époque, j’allais dans l’immense école secondaire polyvalente Calixa-Lavallée
(Montréal-Nord) fréquentée par 3200 élèves (dans une bâtisse toute nouvelle, de
six étages). Pour ne pas souffrir de total anonymat, je me suis vite joint au
groupe de pastorale du midi et à l’équipe d’apprentis-pianistes. Attention, on
ne parle pas ici de grands groupes mais de toutes petites équipes… Nous étions
trois à fréquenter le Salon de la Pastorale… Faites le compte… Trois sur 3200…
Un jour, l’aumônier, un prêtre, nous convoque à son bureau et veut vérifier nos
motivations : étions-nous là pour éviter d’aller dehors après avvoir dîné?
Étions-nous (et je le cite) «…un genre d’enfants de chœur attardés…?» Ouch! Je
vous dirais qu’il a eu droit à un petit appel téléphonique de ma mère, le
lendemain. Il a fini par admettre qu’il s’avérait possible que, même dans les
années post-révolution tranquille, des ados aient une attirance pour Jésus et
son Évangile et désirent concrétiser leur appartenance à la famille du Christ,
au risque de passer pour des bizzaroïdes. Ce qu’on vit aujourd’hui dans
l’Église du Québec ne date pas d’hier. On m’a dit que le prêtre en question a
demandé sa laïcisation, et la jeune religieuse avec qui il oeuvrait dans
l’école a aussi quitté l’habit. Dans ce contexte, j’ai pourtant grandi dans mon
attachement au Christ, d’une manière profonde, l’adversité m’amenant à creuser
mes motivations et la vérité de ma foi.
Je dirais
que ce trio en pastorale scolaire fut l’embryon de ce que serait plus tard ma
vocation de leader-jeunesse. Avec beaucoup d’efforts de publicité dans l’agora
de l’école et via l’intercom, nous avons réussi à atteindre l’énorme chiffre
de… six participants aux activités parascolaires pastorales (exposition
audio-visuelle sur Jésus, temps de discussion sur des sujets d’actualité,
partage de vécu, moments de prière personnelle guidée, eucharisties trois
fois/semaine, sorties caritatives chez des aînés malades et/ou handicapés
physiquement ou intellectuellement, bénévolat dans des lieux où l’on s’occupait
et servait des gens démunis et même des sans-abri, etc.