Un problème? (17)

 

L'un des corridors du Grand Séminaire


Être convoqué au bureau du recteur du Grand Séminaire, en fin d’année, c’est aussi stressant qu’être appelé à celui du directeur d’école, vraiment. J’en avais mal au ventre. Mais qu’ai-je donc fait pour mériter cela (réaction surprenamment infantile, non?)?


Rien de mal, assurément. Mais celui-ci me dit qu’ils me garderont une année de plus, sous observation… Quoi? Je vous inquiète? Je n’ai pas fait ce qu’il fallait? Pourtant… « Non -me dit-il- tu es un bon candidat, obéissant, à l’écoute, au service des autres. Nous t’apprécions à plusieurs égards. Ton accompagnateur fait une bonne évaluation de toi, ton responsable de groupe aussi. Tes confrères aiment ce que tu es. Sauf que, nous ne voulons pas créer de précédent, et tu serais le premier candidat de l’histoire à passer au stage en paroisse après seulement un an ici. Avouons-le, c’est peu, une année, pour vérifier tout ce que nous voulons vérifier d’un futur prêtre, en particulier son appel et ses aptitudes à la vie sacerdotale. Mieux vaut discerner maintenant qu’une fois trop avancé dans le cheminement. »


J’étais d’accord avec le principe, et je me disais qu’une année de plus pour approfondir ma foi, ma relation avec Dieu ne pourrait qu’être bénéfique.  Mais je voyais aussi les frais supplémentaires que ça occasionnerait, et je me demandais comment j’utiliserais mon temps, à part la prière, durant cette année? Le recteur m’offre alors différentes possibilités : stagiaire dans un hôpital ou un centre d’aînés (on parle d’animation spirituelle, bien entendu) ou insertion dans une paroisse du coin, mais tout cela à temps partiel… Je rêvais tellement d’un temps plein en paroisse, pour gagner ma croûte et me plonger dans la vraie vie d’un futur prêtre en communauté chrétienne. Je ne percevais vraiment pas d’appel pour autre chose. J’ai toujours aimé beaucoup mon implication en paroisse. L’autre possibilité : faire ma maîtrise en théologie. Le recteur me vend l’idée, me dit que ce serait l’idéal que tous les futurs prêtres aient leur diplôme de maîtrise, alors pourquoi ne pas saisir cette opportunité avant de m’embarquer à plein dans le travail pastoral? L’université est à un jet de pierre du Séminaire (en fait, quelques minutes en bus). Je suivrais les cours et je pourrais écrire mon mémoire durant ma première année de stage en paroisse, ou demeurer ici une troisième année.


Dans les jours qui suivirent, je pris le temps d’encaisser le choc. De prier intensément, de réfléchir. J’ai partagé avec mes proches, j’ai consulté mes ‘Sages’ habituels. Finalement, j’ai accepté. Même si je commençais à en avoir marre des études supérieures (quand même… déjà six ans et demie de cours universitaires), mon amour pour la lecture et la découverte intellectuelle s’imposa. C’était au fond une nouvelle expérience que j’avais envie de vivre.


Fait particulier : la classe de quatrième année à laquelle on m’avait intégré quittait le GS… Je me retrouvais donc sans groupe d’appartenance. Orphelin. On me conseilla de me joindre, lorsque possible selon mes horaires, à un groupe qui me convenait. J’ai pensé à celui qui passait à sa seconde année, d’autant plus que je me sentais déjà près d’eux puisque nous avions commencé en même temps et que des liens s’étaient tissés.


Et pour les frais, concrètement, monsieur le recteur? Je n’avais pas prévu cela… « Pas de problème, me répondit-il! Nous  avons un plan (vive la Providence!): nous t’avons déjà trouvé un emploi pour l’été. Tu pourras accumuler le nécessaire pour cette année supplémentaire et le reste te sera avancé par l’œuvre des vocations. » Vous avez déniché un boulot pour moi? dis-je, très surpris et un peu inquiet. Mais, où ça? « Ici », me dit-il, tout rayonnant! …ICI ???

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Samedi prochain: 'Ça clique!'

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