60 ans de communion-s (Article hors-série)

 


Les voisins devaient avoir hâte que j’élargisse mon répertoire… Depuis des semaines, je chantais à pleine voix tout en me ‘balancignant’ (pour prendre l’expression populaire sur ma rue) à haute-vitesse dans la cour arrière. Dès les premières douceurs d’avril, on pouvait entendre en provenance de chez-moi : « C’est le grand jour, bientôt l’ange mon frère partagera son banquet avec moi. Des pleurs de joie inondent mes paupières, ô mon Jésus, je vole, je cours à toi! » Les gens de mon âge s’en souviendront.  Mes voisins aussi! Quelle symphonie que ma voix aigüe d’enfant sur fond de grincement de chaînes de balançoire…pendant des heures. Mais j’avais tellement hâte à ce jour béni.

En ce mois de mai 2024, cela fait 60 ans que j’ai reçu ma première des Communions. Bien préparé par l’école, par mes parents, ma fréquentation assidue de la messe en famille, à six ans –première année primaire- j’ai vraiment rencontré Jésus dans l’Eucharistie, et on ne s’est jamais quittés. Je ne vous dis pas que j’ai toujours eu le goût de la messe, comme enfant ou ado, ce serait mentir; parfois l’attirance que j’avais pour la chaleur de mon lit douillet et le confort de mes pantoufles, le dimanche matin, s’avérait plus forte que l’élan de me lever pour me joindre à l’assemblée dominicale… Mais, au fond de moi, je savais que Jésus m’y attendait, c’est ce qui me motivait le plus à sortir de mon apathie. Ajoutons la douce pression de mes parents, tout de même (sans oublier leur exemple de fidélité et de cohérence dans leur vie chrétienne), et la promesse d’arrêter à la boulangerie du coin après la cérémonie, pour quelques délicieuses pâtisseries françaises…

Je reviens à la scène de mai 1964 : dans mon église paroissiale (Saint-Vital, à Montréal-Nord) nous avancions solennellement dans l’allée centrale, vêtus de nos plus beaux atours, les garçons d’un côté, les filles de l’autre, les gars les paumes jointes, les filles les doigts entrelacés, nous nous préparions à nous agenouiller à la Sainte Table, les mains sous la nappe blanche, et à recevoir l’hostie sur la langue. Avant la réforme liturgique de Vatican II, nous ne pouvions croquer l’hostie sous peine de grave sacrilège. Il ne fallait même pas qu’elle touche à nos dents et, Dieu nous en garde, qu’elle colle au palais! Quel défi pour de petits ayant la bouche sèche de nervosité. 


(Quelques cadeaux de ma première communion: missel de l'ancien rite et chapelet)

Malgré ces contraintes stressantes, je fus ravi, dans le sens le plus fort du terme. Sans oublier mon extase quand nous avons entonné d’un seul cœur : ‘C’est le Grand Jour’, après avoir reçu l’Eucharistie!

Et pour moi, le repas de fête planifié chez-moi pour l’après célébration (une surprise, d’ailleurs) avec quelques membres de la parenté, dont mes marraine-parrain de baptême, a été un moment fort, et j’ai bien sûr beaucoup apprécié les cadeaux (dont ma première montre Timex (!), et plusieurs articles religieux), mais l’essentiel pour mon petit cœur d’enfant, c’était d’enfin recevoir Jésus dans la sainte hostie. Quelle intimité extraordinaire, mon meilleur ami, Jésus, si proche. Je n’oublierai jamais ce magnifique dimanche ensoleillé et doux de printemps, la météo en harmonie avec la Lumière et la Joie m’habitant. Une grande Grâce qui a fait fidèlement son œuvre dans ma vie depuis six décennies. C’est la Grâce que je souhaite à tous nos futurs communiants, de tous âges.

Que le Christ-Ressuscité qui se donne à nous si généreusement, vous bénisse et soit toujours votre Pain de Vie!

(Images pieuses et cartes reçues à cette occasion)


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