Enfin l'ordination! Début du processus. (51)
Ma réflexion se poursuivait toujours au sujet de ma demande d’ordination presbytérale. Un jour, ce fut clair dans ma tête et mon cœur. Cela demeure flou dans ma mémoire, mais je pense qu’une fois écoulés les six mois règlementaires entre l’ordination diaconale et celle de la prêtrise, je me sentis prêt intérieurement à aller de l’avant. La voix du Seigneur m’appelait à jeter mes filets et à avancer avec confiance en eaux profondes. Je ne suis pas certain de tout ce que cela demandait précisément comme étapes (on parle de 1988…), mais je me rappelle que j’en avais discuté, cela allait de soi, avec le curé Jean, mon directeur de stage, et mon conseiller spirituel, l’abbé Michel. J’ai eu leur bénédiction. Il me fallait alors écrire une lettre officielle à notre frère archevêque de Montréal de l’époque, Paul Grégoire, et attendre sa réponse.
Je me
rappelle aussi qu’il y avait eu une rencontre (sans ma
présence) au presbytère de l’Assomption, convoquée par des représentants du
Séminaire et du diocèse, pour sonder les gens de la communauté qui m’avaient le
plus côtoyé dans le travail. Pensons Conseil de pastorale, conseil de fabrique,
comités divers, animatrices de pastorale au primaire et au secondaire, personnes
de différents âges représentant la communauté qui m’avait vu faire du ministère
(dont des jeunes et certains animateurs/animatrices), au final une pleine table
de paroissiens à qui on demandait s’ils me croyaient aptes à la prêtrise. Vous
me direz que les invités à cette soirée s’avèrent déjà vendus à la cause… Pas
nécessairement. Même si la majorité m’apppréciait et même m’aimait, mon style ne
plaisait pas à tout le monde, et les gens avaient eu le temps, depuis mon
arrivée en 1986, de découvrir une partie de mes défauts et de mes limites. Les animateurs
de la soirée, expérimentés en la matière (un prêtre-psychologue en faisait
partie), savaient poser les bonnes questions (interrogatoire et contre-interrogatoire?) pour
une plus grande objectivité du processus, dans la mesure du possible.
Les propos
échangés lors de cette réunion doivent rester secrets, surtout si le bilan s’avère
négatif. Par contre, si le candidat est recommandé, les gens pourront en jaser
avec lui…après l’ordination. Ce fut le cas. J’espère ne pas vendre la mèche
pour de futurs candidats, mais on m’a révélé une question ‘piège’ qui avait mis
les participants sur les dents : ‘À votre opinion, pensez-vous que
Jean-Pierre ferait un bon père de famille?’ Oh… Si on dit oui, cela nuit-il à
la possibilité de l’ordination? Si on dit non, est-ce vraiment positif par
rapport au sacerdoce? Malaise. En toute sincérité et vérité, insistaient les
animateurs… Et la réponse fut ‘oui, il est paternel, il a sans doute les
qualités requises pour devenir un bon papa.’ Je n’ai pas eu d’autres détails et,
entre vous et moi, cela n’aurait pu se vérifier totalement que si j’avais
vraiment eu des enfants, mais mon tempérament, mes attitudes, mon écoute, ma
pédagogie, mon affectivité, etc., tout allait dans le sens de la paternité.
Peurs non fondées, pour les gens autour de la table, puisque c’est ce que
voulaient entendre les représentants de l’évêque. Un bon prêtre sera celui qui,
avant tout, aimera avec un cœur de père, affirmèrent-ils, avec raison.
Un jour,
arriva la lettre officielle: j’étais appelé à l’ordination
presbytérale par mon archevêque (le ‘porte-parole’ du Seigneur) et cela se vivrait
le samedi, 17 juin 1989, deux semaines avant mes 32 ans, dans ma communauté de
stage. Allégresse dans la maison! Vite, mettons-nous à l’ouvrage pour une célébration
qui sera mémorable. Une première dans l’église de l’Assomption (avant Vatican
II cela se vivait à la cathédrale, pour des dizaines de candidats à la fois),
me confirmait-on.
Vous
devinez qu’avec un curé comme Jean, et un gars comme vous me connaissez, l’événement
n’aurait rien de pompeux et d’orgueilleux, mais demeurerait simple, inclusif, lumineux, fraternel et évangélique, dans la Beauté. On s’en reparle.