Un 'concile' provincial à l'Assomption (Suite et fin) (71)
Le grand chapiteau étant devenu inutilisable à cause de la tempête de vent et de pluie, allions-nous devoir annuler l'événement? Évidemment, ça n'était pas possible. L'aréna de l'Assomption serait-il disponible, à la dernière minute comme ça? Peu probable.
Heureusement que Marie-Jeunesse n'en était pas à son premier Concile et que leur logistique s'avérait bien rodée! Il suffit d'une communication téléphonique et, croyez-le ou non, suite à notre appel de détresse les installateurs de tentes sont revenus de Québec quelques heures plus tard avec un nouvel abri qu'ils ont installé illico (par-dessus la structure qu'ils ont inspectée et qui, elle, se trouvait en parfait état, heureusement). Il faisait nuit quand ils ont terminé. Quel beau cadeau!
Les invités sont arrivés progressivement, je vous fais grâce des détails du déroulement de l'accueil; ils ont été assignés à leur lieu de séjour. On s'en doute, il y eut quelques pépins et réajustements de dernière minute...tout à fait normaux dans une organisation de cette envergure. Un gros congrès! Mais rien de majeur. Tout se déroulait comme prévu. Jusqu'à ce que... Mère nature se déchaîne encore.
Les anciens de la place affirmaient ne jamais avoir connu autant de pluie à cette période de l'année, en quelques jours seulement; ils ajoutaient aussitôt, très étonnés, ne jamais avoir vu la rivière l'Assomption aussi haute au début de l'été.
J'avais laissé la porte arrière du presbytère déverrouillée en invitant les jeunes qui se relayaient durant la nuit près du chapiteau à ne pas hésiter à venir me chercher s'il y avait un incident majeur durant mon sommeil. Je n'avais pas d'appareil télépĥonique prés de mon lit, dans ma chambre à l'étage, et mon curé profitait alors de ses vacances. Voilà que, me réveillant en sursaut, je vois arriver deux grands gaillards devant mon lit qui me disent que je dois me rendre illico au lieu de rassemblement parce que...la tente est inondée! Il faut couper le courant (plusieurs fils traînaient au sol), et enlever en urgence tout le matériel électronique pour le mettre à l'abri dans l'école juste à côté.Toute aide sera grandement appréciée. Je ne me souviens pas s'il s'agissait de la première ou de la deuxième nuit, mais quelle épreuve encore!
Je m'habille à la vitesse d'un pompier et je file en voiture jusqu'au lieu en question pour faire ma part. L'un des responsables m'affirme que le toit ne coule pas. Toute cette eau de pluie vient directement du terrain de l'école. Selon lui, il fallait absolument creuser une tranchée tout autour du chapiteau! Vous comprenez que nous n'étions pas situés dans une cour d'école en asphalte mais sur un terrain gazonné. Celui-ci nous a été prêté par la Commission scolaire. On ne peut pas bêcher comme ça! Comment rejoindre, en fin juin, au beau milieu de la nuit, quelqu'un qui nous donnerait (peut-être...) l'autorisation d'altérer gravement le site? Pardon, Seigneur, mais nous le ferons tout de même. Et nous réparerons nos dégâts par la suite, à nos frais évidemment. Nous voilà, tous pieds nus dans plusieurs centimètres d'eau en train de manier la pelle (j'avais appelé des paroissiens en renfort avec leurs outils) pour créer des canaux vers la rivière et ainsi donner le temps au sol de s'assécher le plus possible avant les activités du lendemain...enfin...de la matinée...quelques heures plus tard seulement.
J'ai peu dormi, durant ce concile, croyez-moi. De même pour les autres responsables. Mais tout le reste s'est déroulé sans anicroches, les enseignements, les temps de prière -mariale et autre, l'Eucharistie du dimanche, l'animation musicale (une des forces de Marie-Jeunesse: ils composent leurs propres chants), les témoignages, l'Adoration dans l'église paroissiale, les activités ludiques et sportives, le lien avec la communauté; sans oublier les repas dans la cafétéria de l'école qui furent appréciés par tous (plusieurs bénévoles et commanditaires ont montré une générosité exceptionnelle, dont des parents de nos jeunes qui s'avéraient cuisiniers de métier). Somme toute, une 'retraite' spirituelle et fraternelle de toute beauté, un événement inoubliable et marquant pour tous, ayant suscité la solidarité inter-générationnelle et l'engagement de tout un milieu pour un temps de ressourcement chrétien catholique dont on parlera longtemps dans l'Assomption et tout le secteur pastoral. La thématique choisie par Marie-Jeunesse: «L'Aventure des aventures» (Nous l'adopterons plus tard comme fil conducteur d'une année de pasto-jeunesse). Vous vous rappellerez peut-être de leur chant du même nom, que j'ai utilisé souvent en préparation et en célébration des Confirmations: 'La foi, c'est l'aventure, la foi, c'est l'aventure des aventures!' Disons que ce long week-end a bien illustré le thème, non? Comme une prémonition.
Voilà que la visite de partout au Québec et d'ailleurs (je me rappelle de jeunes originaires de l'Île-de-la-Réunion où Marie-Jeunesse avait une Maison) a pris le chemin du retour. Demeurent sur place le noyau organisateur de M-J et, nous, du comité de la paroisse. Il s'agit d'une belle tradition: l'aumônier de la famille spirituelle préside une intime eucharistie d'action de grâces, sous la tente pour boucler la boucle. Joie et repos dans l'Esprit! Nous pouvions souffler un peu, remercier le Seigneur (malgré les épreuves qui nous ont sans doute fait grandir dans la foi et l'amour) et lui demander de continuer à féconder ce que nous avions semé dans le coeur des participants.
Au moment de commencer son homélie-partage, je vois que le prêtre accompagnateur regarde intensément derrière moi. Une voiture vient d'arriver en coup de vent et l'un de mes amis en sort en courant, en s'excusant de nous déranger ainsi, mais il me réclamait au presbystère en urgence: ma mère (qui habitait depuis peu avec moi, après le décès de mon père) venait de tomber du balcon de la cuisine! La rampe (au bois pourri!) avait cédé alors que Rose s'appuyait dessus tout en jasant avec une amie qui passait... Une chute d'environ deux mètres! Je ne me rappelle presque pas des minutes suivantes, sinon que j'ai rapidement fait mes au revoir à l'équipe et demandé que tous prient pour ma mère et moi en continuant la messe. Je pris ma voiture et conduisis comme dans un état second, me stationnant dans l'étroit espace entre deux voitures devant le garage (à quelques centimètres seulement de leurs rétroviseurs, m'a-t-on dit). Ma mère était étendue sur une chaise longue dans une salle près de la cuisine, accompagnée de deux ambulanciers qui prenaient ses signes vitaux, lui posaient des questions pour vérifier sa lucidité, et lui demandaient si elle ressentait des douleurs à quelque part... Incroyable, mais pas de commotion, ni de fractures. Seulement une grosse peur! Et aucunes séquelles subséquentes importantes, sinon des courbatures et des bleus. Ma mère nous manifestait à tous une grande reconnaissance de l'entourer ainsi et affirmait sans cesse qu'elle se sentait bien (elle avait hâte qu'on lui laisse la paix!). Donc, pas de radiographies nécessaires, pas de transport à l'hôpital. Et les intervenants de me demander simplement de garder ma mère éveillée le plus longtemps possible au cas où se manifesteraient des symptômes de commotion cérébrale (nausées, vomissements, mal de tête, confusion...), ou d'hémorragie interne. Une surveillance de près s'imposait avec raison pour les prochaines heures. Pas de problème, de toute façon j'avais l'adrénaline au plafond. Et, une nuit blanche de plus ou de moins, à ce stade...
Avant de quitter, les ambulanciers me demandent à voir le lieu de la chute. Je les y conduis, curieux moi-même. En voyons la scène, nous constatons tous les trois que maman est tombée sur une mince bande de terre et de gazon, entre le bord du balcon et le trottoir de béton, tellement proche. À peine un mètre plus loin, et les conséquences auraient été dramatiques (fracture du bassin et autres 'agréables' surprises du genre), potentiellement mortelles en cas de brisure du cou; Rose avait tout de même soixante-quatorze (74) ans, à ce moment-là et venait de tomber de haut. L'un des intervenants de me dire: 'La terre, assez molle, fut un peu comme un coussin amortissant l'atterrissage de votre mère.' Et de continuer: 'Heureusement qu'il avait autant plu durant les derniers jours...Providentiel.'
La semaine prochaine: Mains-tenons nos promesses